Grippe : le Medef veut supprimer les arrêts maladie à 100 % pour les non-vaccinés

Dans le cadre des discussions autour du budget de la Sécurité sociale pour 2026, le Medef a formulé une proposition qui fait déjà débat : supprimer l’indemnisation à 100 % des arrêts maladie liés à la grippe pour les salariés non vaccinés. L’organisation patronale veut responsabiliser les actifs et réduire les coûts liés aux congés maladie évitables. Une suggestion qui soulève de nombreuses réactions, tant sur le plan éthique que juridique.

Une mesure jugée “incitative” par le Medef

Le président du Medef, Patrick Martin, a présenté cette idée lors d’une table ronde préparatoire au projet de loi de financement de la Sécurité sociale 2026. L’objectif ? Encourager la vaccination contre la grippe saisonnière tout en maîtrisant les dépenses publiques et patronales liées aux arrêts maladie. « Il n’est pas logique de maintenir une indemnisation à 100 % pour des arrêts qui pourraient être évités par un acte de prévention simple, gratuit et recommandé », a-t-il déclaré.

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Depuis la crise sanitaire liée au Covid-19, certains arrêts maladie — notamment pour les salariés testés positifs — ont été indemnisés à 100 % dès le premier jour. Ce régime dérogatoire a ensuite été élargi ponctuellement à la grippe saisonnière. Le Medef souhaite désormais que cette prise en charge soit conditionnée au fait que le salarié ait reçu son vaccin antigrippal.

Des économies à la clé, selon les employeurs

Chaque hiver, la grippe provoque entre 2 et 6 millions de consultations en France et jusqu’à 2 millions de jours d’arrêt maladie. Le coût indirect pour les entreprises — absentéisme, perte de productivité, remplacements temporaires — est estimé à plusieurs centaines de millions d’euros. Pour le Medef, agir sur la prévention permettrait d’**alléger la charge pour les entreprises** et les finances publiques, sans remettre en cause l’accès aux soins.

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« Il ne s’agit pas de sanctionner, mais de créer un levier positif pour la vaccination », estime un porte-parole du Medef. L’organisation évoque aussi un alignement possible avec certaines pratiques en vigueur dans d’autres pays européens comme l’Allemagne, où les entreprises incitent fortement leurs salariés à se faire vacciner via des primes ou des jours de congés supplémentaires.

Réactions syndicales et débat éthique

Du côté des syndicats, la proposition est jugée inacceptable. Pour la CFDT, « on ne peut pas conditionner l’accès à l’indemnisation à un choix médical individuel. Ce serait une forme de pression déguisée et discriminatoire. » La CGT, de son côté, y voit « une atteinte au droit à la santé » et demande au gouvernement de rejeter fermement toute mesure de ce type dans la future loi de financement.

Des médecins alertent aussi sur les effets contre-productifs possibles : « Si les salariés craignent de perdre leur salaire, ils risquent de venir travailler malades, ce qui pourrait favoriser la propagation du virus dans les entreprises », prévient le Dr Émilie Laporte, généraliste en région parisienne.

Que dit le droit ?

Actuellement, l’indemnisation des arrêts maladie est encadrée par la Sécurité sociale. Un salarié bénéficie d’indemnités journalières après un délai de carence de 3 jours, sauf en cas de convention collective ou de complément employeur. La prise en charge à 100 % pour la grippe est une mesure exceptionnelle, mise en place dans certains cas spécifiques, notamment dans les Ehpad ou les hôpitaux.

Pour conditionner cette indemnisation à un critère médical comme la vaccination, il faudrait probablement modifier la législation actuelle et garantir le respect du secret médical et des libertés individuelles. Le Conseil d’État ou le Conseil constitutionnel pourraient être saisis si une telle disposition était intégrée dans une loi.

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Une ligne rouge pour le gouvernement ?

Sollicité par la presse, le ministère de la Santé a indiqué que « cette proposition du Medef sera étudiée dans le cadre des concertations à venir, mais aucune mesure de ce type n’est à l’ordre du jour pour l’instant ». En interne, plusieurs sources au sein de la majorité jugeraient cette idée « politiquement risquée », surtout à la veille des élections présidentielles de 2027.

Reste à savoir si cette proposition restera symbolique ou si elle ouvrira un débat plus large sur la responsabilisation des salariés face à la prévention sanitaire. Une chose est sûre : elle ne laisse personne indifférent.

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